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Photographe: Jean-Michel Lefebvre ©
Date: 2
juin 1973
Format: 35mm B&W
negative
Sujet: XXXème
Salon International de Paris
Lieu: Le
Bourget
Pays: France
EDITO
Cette seconde
partie consacrée aux présentations en vol du 30ème Salon
contient quelques photos intéressantes, surtout celles montrant
à l'évidence que Mikhali Koslov, chef pilote d'essais du
Tupolev, et Victor Moltchanov, le pilote d'essais qui
l'accompagnait, avaient envie de prouver que leur Tu-144 était
mieux motorisé et conçu aérodynamiquement donc plus performant
au décollage, plus apte à afficher un important taux initial de
montée pour s'affranchir plus vite des perturbations atmosphériques
basses et gagner plus vite les hautes altitudes, plus capable à
voler lentement à grande incidence et à réaccélérer plus
fort tout en adoptant de saisissantes pentes de montée, bref en
se montrant plus performant et plus maniable que le grand rival
Concorde dès à partir le plus bas segment de la fourchette des
vitesses conduisant au bi-sonique. Avec l'ambition d'être
meilleurs dans la seule partie du domaine de vol complètement
visible ici par le public et les spécialistes, on ne peut que
penser, en ce samedi 2 juin au moins, que les pilotes soviétiques
roulant au sol et assistant depuis leur cockpit à la démonstration
de Concorde ont pu se convaincre d'en montrer encore un tout
petit peu mieux que ce que venait de faire l'avion franco-britannique
afin d'obtenir la palme dans l'esprit de tous, ne serait-ce qu'en
activant la remontée du train dès à peine le sol quitté à la
seule fin de prendre plus vite encore assez de vitesse pour
pouvoir monter très spectaculairement au ciel, ceci au plus près
des yeux des spectateurs !!!
Comme quelques pilotes venus aux Salons du Bourget et qui y sont
morts ou non, ceux du Tupolev ont très certainement été pris
par ces petites fièvres du vouloir faire mieux encore par
rapport à soi ou par rapport à ce qu'ils ont vu de la présentation
des avions directement rivaux. Il faut bien se dire que dans un
show comme celui de Paris où il y a des enjeux immédiats et à
long terme parfois considérables (réels mais aussi existant
seulement dans la tête avionneurs) on peut assimiler les
prestations à celles des patineurs sur glace qui recherchent le
top résultat tant par l'élégance de leur programme que par
l'accumulation de figures très pointues montrant aux spécialistes
que l'on possède une réelle supériorité tant dans la qualité
de l'évolution que dans celle de la technique humaine (ou du matériel
en ce qui concerne l'aviation). Les patineurs, eux, s'entraînent
durement au fil de très nombreuses années et sont conditionnés
pour affronter jurys et spectateurs tandis que les pilotes
d'essais accomplissant de leur côté et à longueur d'année un
métier exigeant rigueur absolue et sang-froid à toute épreuve
sont amenés, sans y être préparés outre-mesure, à monter en
spectacle tout aussi concentré donc enchaîné leur immense
savoir faire pour révéler le meilleur de leurs montures aux
observateurs internationaux parfois futurs clients ainsi qu'à la
foule attendant toujours du sang et des larmes bien qu'elle s'en
défende commeun beau diable... Alors pris parfois au jeu ils en
remettent un tout petit sur une couche déjà brillantissime pour
montrer le meilleur d'eux-même et chutent tout à fait comme le
patineur qui n'a pas eu tout à fait le temps de peaufiner le
tout premier quadruple axel réalisé au monde et, c'est là
l'important, devant les autres...
C'est peut-être bien ce qui est arrivé à Mikhali Kosslov et
son équipage le lendemain, dimanche 3 juin.
Et puis n'ayant jamais vu, autrement que dans la petitesse d'un viseur, Concorde et Tupolev volant en même temps dans la partie de ciel verticale au Bourget, je ne me prive pas de vous les restituer tous deux presque à l'excès car en prime il y a, entre les deux rivaux, l'ombre du supersonique soviétique. Soyez sûr que la globalité de pareille vision fut infiniment plus brève que n'importe quelle ombre chinoise montrée en spectacle !!!
Jean-Michel J. Lefebvre